Les éditions du Panthéon condamnées

« Peu d'auteurs débutants osent demander des comptes en justice lorsqu'ils se sont fait grugés par les promesses fallacieuses de certains prestataires de l'édition. L'engorgement des tribunaux en manque de moyens provoque des retards préjudiciables aux victimes de ces commerçants indélicats. Aussi, l'édition à compte d'auteur abusif tourne-t-elle à plein régime. Mais il arrive parfois qu'une victime en fasse une affaire d'honneur et persiste jusqu'au bout pour se faire rendre justice.

Les Editions du Panthéon, une officine spécialisée dans le compte d'auteur abusif que le guide Audace tomate depuis des lustres, viennent d'être condamnées le 20 janvier 2011 à verser 5 000 € à un auteur au titre des dommages et intérêts. Madame Marie R... avait signé en 1998 un contrat pour la publication de son manuscrit. Le prestataire avait proposé en contrepartie d'une rémunération de près de 7 000 € de réaliser un livre à 3 000 exemplaires, de le diffuser et le vendre. Au bout de 3ans, 14 exemplaires avaient été vendus.

Le parcours d'une combattante

L'affaire a connu quelques avatars avant de se conclure favorablement. Ordonnance de non-lieu suite à une première plainte pénale pour publicité mensongère ; l'auteure est ensuite déboutée par le tribunal d'instance de son assignation pour exécution fautive des prestations requises. Mairie R... sûre de son bon droit, ne se décourage pas et fait appel de la décision. La Cour d'appel de Paris lui donne raison. Elle constate que les Editions du Panthéon n'ont justifié d'aucun service de presse, d'aucun diffuseur ou circuit réel de distribution et que ces manquements aux obligations de moyens ont entraîné une perte de résultats tant sur le plan de la commercialisation de l'œuvre, que sur celui du préjudice moral. L'arrêt infirme le jugement précédent et condamne la société éditrice à verser 5 000 € à son auteur et aux dépens.

Quand l'échec au pénal sert le civil

L'ordonnance de non-lieu constatait que la demande de publicité mensongère ne pouvait être soutenue, mais l'enquête de police qui avait précédé mettait en évidence les dysfonctionnements de la Société dans l'exécution des obligations. L'arrêt de la Cour d'appel constate que les vérifications opérées par Marie R... sur les libraires sont exactes et montrent le manque de sérieux de l'éditeur. En revanche, les témoignages des libraires versés aux débats avaient été recueillis par le directeur du Panthéon postérieurement à sa déposition aux services de police. L'enquête de vérification démontrait la présence d'anomalies dans ces pièces fournies tardivement.

Marie R... n'est pas remboursée de l'intégralité de la rémunération initiale car les magistrats considèrent que l'éditeur a rempli une partie de ses obligations en fabriquant l'intégralité du tirage contractuel. Aujourd'hui, avec le développement des nouvelles techniques et des nouveaux usages dans l'édition à compte d'auteur, un tel tirage – pour des résultats aussi maigres – serait considéré comme de nature à induire en erreur l'auteur sur les capacités réelles de l'éditeur. H.

 

 

 

...L'additif

Le Panthéon réagit

Le nouveau directeur du Panthéon n'apprécie pas l'article précèdent. C'est normal puisque Marie R... avait eu à pâtir de l'ancienne direction. Le repreneur, Geoffroy Délépine, se trouve obligé d'exécuter une décision de justice pour des agissements commis par son prédécesseur.

Cela peut paraître immoral, d'autant que depuis la reprise, nous n'enregistrons quasiment plus de récriminations. Ça l'est moins, car l'acquéreur, qui a dû être informé préalablement, en a tenu compte dans le chiffrement de son offre. Ça ne l'est pas du tout, si on considère que l'auteur, par extrême malchance, aurait pu perdre. Et le dirigeant actuel aurait recueilli les fruits de la décision au nom de la continuité de la personne morale.

Geoffroy Délépine, après avoir écrit qu'il y avait matière à diffamation, me propose une rencontre « pour échanger sur l'édition à compte d'auteur ». Ne voyant pas l'intérêt d'un tel échange, je l'invite, puisque l'offre actuelle ne génère quasiment plus d'aigreur chez les auteurs, à m'envoyer sa procédure contractuelle pour avis dépassionné. Sans succès jusqu'à présent !

 

 

© loieplate - 04 juillet 2011

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